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Productions audiovisuelles

Moments et propos

Les atrocités allemandes étaient telles que toute le monde est resté muet. Le fait qu’on ne s’exprimait pas, ce n’est pas qu’on ne voulait pas, mais qu’on était incapable d’ouvrir la bouche devant l’immensité des horreurs qu’ils ont commis. On n’ose même pas ouvrir la bouche maintenant; on est à la fois terrorisé par le fait qui s’est passé et par une sorte de terreur de ce qui peut arriver, étant donné que ce sont des crimes qui sont restés non-inscrits dans notre mémoire, comme une sorte de non-présence. Une des formes fondamentales de la mémoire est l’art, parce que ce que nous connaissons des autres civilisations passe par l’art, uniquement par l’art. Donc, l’art babylonien, de Byzance … tout ça nous parvient à travers l’art plastique, surtout de l’époque – maintenant, nous avons d’autres formes -, mais par l’art plastique comme cristallisation visuelle à la fois du mal et du bien. Or l’art je dois le dire était frappé d’impuissance après la deuxième guerre mondiale; c’est pourquoi on doit se poser la question (de savoir) si l’art peut répondre immédiatement, de quelle manière il peut réagir immédiatement à ce qui se passe.

Vous savez, la peinture c’est une question de conscience aussi. Si ça peut éveiller une conscience vers ça, vous aurez déjà une réponse plus ou moins positive. Mais une conscience picturale, vous la trouvez sous différentes étapes de l’art. La conscience qui est liée au destin, pas seulement à l’amour – à l’amour vous avez beaucoup de résonance – mais aussi la conscience je ne dirai pas par rapport à la mort, ça c’est tout le temps, mais par rapport à l’anéantissement. Par qui, comment, pourquoi ? Exactement les questions que j’ai posé à l’allemand à Lomza (prison polonaise). Je posais ces questions stupides : par qui ? comment ? pourquoi ? quand ?

Mots clés : mémoire | art plastique | Babylone | Byzance | deuxième guerre mondiale | cristallisation visuelle | mal | bien | peinture | question de conscience | conscience picturale | anéantissement

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Témoins et récits

Si je suis vivant, ce n’est pas que j’étais plus fort que les autres, plus glorieux ou je ne sais pas, avec plus de morale … surtout pas ça. Quand je l’ai vu – Gott mein Gott – je me disais en moi-même : ils n’ont pas droit à ma vie. Vous comprenez,  quelque part, c’est une chose qui peut se réveiller on ne sait pas quand. D’ailleurs, la suite, ce qui s’est passé après aussi à Birkenau, c’est à dire ne pas se laisser animaliser, ne pas se laisser devenir ce qu’eux voulaient faire de nous. Et ça, c’était je crois en mon pouvoir. Plutôt se faire tuer que de se laisser faire transformer comme animal.

Isaac CELNIKIER

Mot clé : animaliser

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